Storytelling et jugement
Par Éric Laurent [1]
La conquête contemporaine de l’opinion dépend de plus en plus de l’histoire qui vient représenter une thèse à travers les multiples médias et l’énumération des faits que l’on sélectionne pour la soutenir.
La campagne de presse préparée par des professionnels pour soutenir la thèse d’un ensemble d’association de parents d’autistes raconte une histoire. Elle caricature la psychanalyse pour proposer les seules thérapies comportementales comme solution adaptée à l’autisme dans son ensemble, et sur toute l’étendue de son spectre. L’épicentre de l’histoire est la France, ou mieux, la France et la Belgique, mais cette histoire doit être pensée globalement.
Résumons. Par des procédés qui consistent à tromper la bonne foi, un soi-disant documentaire réduit la diversité des positions des psychanalystes interrogés à une thèse ridicule : la cause de l’autisme est une faute parentale, spécialement de la mère. La réduction sur le lit de Procuste est établie par amalgames et distorsions. Une fois étable la thèse, l’honneur des parents ainsi incriminés, « culpabilisés », ne peut se laver que par la dénonciation la plus féroce d’une telle approche. Tout pourra être retenu à cet effet et dénaturé pour soutenir la cause.
L’opération est couverte par le recours à la science qui affirmerait pouvoir rendre compte de l’ensemble des phénomènes par une stricte considération biologique, sans tenir compte de la relation qu’entretient le sujet au monde, (…) télécharger la suite.
1. Ce texte est paru dans Lacan Quotidien n°148, le 28 janvier 2012